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Entrevue avec Albert Dupontel et CĂ©cile de France

Crédits photos : Unifrance

Entrevue avec le rĂ©alisateur Albert Dupontel et l’actrice CĂ©cile de France pour la sortie du film Second Tour

Dans cette comĂ©die dramatique qui porte sur le monde politique, Albert Dupontel se met en scĂšne dans un double rĂŽle : celui d’un brillant Ă©conomiste candidat Ă  la prĂ©sidentielle et celui d’un apiculteur en apparence sans histoire. Pour ce film, le cinĂ©aste retrouve son fidĂšle complice de toujours, Nicolas Marier, en plus de CĂ©cile de France, avec qui il partageait l’écran dans le drame En Ă©quilibre (2015). Ici, la comĂ©dienne incarne une journaliste sur la piste d’un grand scoop. Second tour est le huitiĂšme long mĂ©trage d’Albert Dupontel.

On retrouve dans vos films les thĂšmes rĂ©currents de l’abandon et des retrouvailles familiales. Qu’est-ce qui vous attire dans ceux-ci?

Albert Dupontel : Peut-ĂȘtre que je vĂ©hicule les fantĂŽmes gĂ©nĂ©tiques? Peut-ĂȘtre que dans ma gĂ©nĂ©alogie, il y a dĂ©jĂ  eu ça? C’est mĂȘme probable d’ailleurs (rire). Je me souviens que quand mon pĂšre avait vu Bernie, il m’avait demandĂ© : « Mais qu’est-ce que je t’ai fait? » (rire). Lui, il sortait d’un milieu rustique. Moi, j’ai pu faire des Ă©tudes et quand il me voyait faire le guignol, ça le rendait un peu triste (rire). Mais je ne sais pas d’oĂč ça vient. Ce sont des thĂšmes qui me touchent et qui m’intĂ©ressent.

Qu’est-ce qui vous a inspirĂ© l’histoire de Second tour?

Albert : C’est le visionnement d’un documentaire sur la campagne prĂ©sidentielle de 1968 de Robert Kennedy. C’était pendant le confinement de la pandĂ©mie et je trouvais que l’Occident se prĂ©occupait plus d’économie que de santĂ©. Ça me choquait. Et Ă  propos du documentaire, je me suis dit : « Et si Kennedy n’avait rien dit de ce qu’il allait faire? Ce qui est une chose complĂštement saugrenue. » Jour aprĂšs jour, j’ai donc inventĂ© cette fable.

Qu’est-ce qui vous a sĂ©duit dans le choix de CĂ©cile de France pour le personnage de Nathalie Pove?

Albert : Moi, j’aime bien les grandes actrices et elle Ă©tait aussi disponible (rire). Ensuite, c’est elle qui a choisi (rire).

Et vous, CĂ©cile, qu’est-ce qui vous a plu dans le scĂ©nario?

CĂ©cile de France : J’ai adorĂ© le scĂ©nario. J’ai toujours voulu travailler dans un film d’Albert. Et le personnage est absolument savoureux. C’est une espĂšce d’hĂ©roĂŻne mue par sa colĂšre de travailler pour cette chaĂźne-lĂ , qui est lĂąche et fausse alors que Nathalie est courageuse et sincĂšre. J’aimais son indignation aussi envers ce candidat qui est un produit de la caste dominante. Elle sent que ce mec n’est pas sincĂšre et qu’il cache quelque chose. Elle possĂšde Ă©galement du courage, de la dĂ©termination et du sang-froid en prenant le risque de perdre son job en sortant du rang. Elle va oser faire des vagues et ça, Ă  jouer, c’est gĂ©nial (rire)! C’est un personnage idĂ©al pour une actrice. J’avais trĂšs envie de le faire.

Dans Second tour, Albert Dupontel explore le monde politique à travers une fable captivante, interrogeant la sincérité des candidats. Une réflexion percutante sur les enjeux contemporains.

Comment est Albert Dupontel comme réalisateur? Il laisse une belle part de liberté à ses acteurs?

CĂ©cile : Il demande Ă  ce qu’on s’amuse. Il nous donne les informations, sa vision du personnage pour que ça marche. Gus (Nicolas MariĂ©) est le naĂŻf et le tendre. Moi, je suis le cerveau. AprĂšs, on a beaucoup d’espace pour s’amuser. Il faut absolument avoir la sincĂ©ritĂ© la plus profonde, car il y a aussi une partition Ă©motionnelle qui est trĂšs prĂ©sente. Il y a beaucoup de choses Ă  jouer, en fait.

Albert, dans le film, vous jouez un double rîle. Était-ce trùs exigeant pour vous sur le plateau?

Albert : Au dĂ©but, je voulais mettre quelqu’un de plus jeune dans le film. J’avais trouvĂ© un acteur, mais il n’était pas dispo avant un an Ă  cause d’un projet tĂ©lĂ©. J’ai donc dĂ©cidĂ© de m’y coller. On m’a rafraĂźchi un peu numĂ©riquement (rire). D’ailleurs, personne ne m’a emmerdĂ© par rapport Ă  mon Ăąge. Ni mĂȘme CĂ©cile (rire). Mais, oui, c’est fatigant et ça casse un peu ma joie. Le meilleur moment du film que j’ai passĂ©, c’est la premiĂšre semaine quand je n’étais qu’avec CĂ©cile et Nicolas Ă  les regarder jouer. J’avais mes petites notes et je m’amusais comme un petit fou avec eux. J’espĂšre de ne plus jouer dans mes prochains films (rire). Pour Santu l’apiculteur, j’avais une heure et demie de maquillage tous les matins. Ça me gĂąchait le plaisir. Du coup, on fait des bĂȘtises. On est fatiguĂ© et on rate parfois des plans. Le paradoxe quand on fait les deux, jouer et rĂ©aliser, c’est que d’un cĂŽtĂ©, le metteur en scĂšne est un vrai gĂ©omĂštre, tandis que l’acteur doit s’oublier. C’est deux entitĂ©s psychiques trĂšs diffĂ©rentes.

Peut-on qualifier Nicolas MariĂ© d’ĂȘtre votre « Robert De Niro »?

Albert : Oui, oui (rire). C’est un super acteur. Il s’est vraiment bien entendu avec CĂ©cile.

CĂ©cile : C’est quelqu’un de trĂšs gĂ©nĂ©reux, de trĂšs tendre. Albert et lui se connaissent super bien depuis tellement longtemps. Il fallait que j’arrive au galop dans cet univers et Nicolas a toujours Ă©tĂ© lĂ  Ă  me tendre la main, Ă  me regarder avec encouragement et gentillesse. C’est un partenaire de jeu exceptionnel.

Albert : Ils s’amusaient un peu trop (rire).

Quelle a été votre scÚne préférée à tourner?

Albert : Je dirais que celle que je prĂ©fĂšre, c’est quand CĂ©cile crache le morceau sur son enquĂȘte. Elle est Ă  la fois trĂšs Ă©mouvante et en mĂȘme temps trĂšs marrante, car elle reste un peu insolente dans son Ă©motion.

CĂ©cile : Moi, c’est la scĂšne dans la poubelle (rire)! On Ă©tait trop bien. L’équipe Ă©tait au-dessus de nous. C’est vraiment un souvenir de camaraderie.

Par moment, Second tour Ă©voque le film de Frank Capra, Mr. Smith Goes to Washington, par son regard sur la corruption en politique. En cette Ăšre de cynisme et de mĂ©fiance envers la classe politique, ĂȘtes-vous optimiste?

Albert : Pour citer l’écrivain et poĂšte portugais Fernando Pessoa : « Il faut se prĂ©parer au pire en espĂ©rant le meilleur. »

Le fable politique Second tour est prĂ©sentement Ă  l’affiche.