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Cinéma – Mode d’emploi : direction de casting

Vous êtes en train de lire un livre et, tout à coup, vous vous prenez à imaginer un acteur en particulier dans le rôle du personnage principal de votre histoire… Dites-vous que vous venez momentanément de faire, à petite échelle, de la direction de casting ! Si vous voyez un acteur réussir dans un projet en particulier, le tout a débuté grâce à cette tâche qui joue un rôle crucial dès le début du projet.

C’est le mandat de la directrice ou du directeur de casting de sélectionner les acteurs pour les rôles dans un film (ou une série télé ou une publicité). Il doit d’abord analyser le scénario, comprendre les personnages et leurs exigences. Ensuite, il doit parler avec la réalisatrice ou le réalisateur et connaître sa vision des personnages. Il doit littéralement être capable de lire dans sa tête !

Brigitte Viau est directrice de casting au Québec depuis près de 30 ans et, au fil des ans, a eu la chance de participer à plus de 700 projets ! Elle a, entre autres, travaillé en publicité, à la télé (Série noire, Les pêcheurs, Les beaux malaises, Plan B, etc.) et aussi au cinéma (De père en flic 2, La Cordonnière, etc.), dont pour le plus récent film de Francis Leclerc, Le Plongeur. « J’ai rencontré Francis Leclerc grâce à Joanne Forgues et Catherine Faucher, productrices chez Casablanca. Nous en étions à distribuer la deuxième saison de la série télé Les rescapés et elles m’ont présentée à Francis. On a fait la saison deux ensemble et, depuis, Francis renouvelle sa confiance en moi de projet en projet. C’est ce qui m’a amenée au Plongeur. »

Une fois le scénario et les demandes du réalisateur en main, le directeur de casting fera des listes de quels acteurs et actrices il considère pour les différents rôles. Il est crucial de connaître les acteurs et les agences pour ne pas passer à côté d’un talent qui pourrait être parfait pour le projet. Une fois la recherche terminée, on passe les noms dans l’entonnoir pour ne retenir que ceux que la directrice ou le directeur aimerait avoir en audition.

Parfois, un premier casting ne fonctionne pas pour différentes raisons : ça ne colle pas avec le réalisateur, certains critères s’ajoutent ou encore il y a des délais, comme l’explique Brigitte Viau : « Lors d’un casting, il y a toujours une partie plus challengeante. Le Plongeur est sorti en 2022, soit quatre ans après le casting initial de 2018. Quand la pandémie est arrivée, nous avions déjà une partie des rôles qui étaient sur le point d’être distribués. Tout s’est arrêté et nous avons repris quelques années plus tard. On a donc dû refaire une partie du casting, car les âges des acteurs avaient changé. Le personnage de Bébert nous a donné un peu de fil à retordre. Francis Leclerc avait quelque chose de précis en tête et on n’arrivait pas à mettre le doigt dessus. Quand Charles-Aubey Houde est arrivé à l’audition, il nous a littéralement jetés par terre. Du premier coup, c’était clair que Bébert, c’était lui. Des révélations de la sorte en salle d’audition, ça crée des moments uniques. C’est vraiment l’fun quand ça arrive. Tout devient clair. »

Le casting, clé des projets cinématographiques, révèle des talents et écrit des histoires.

Au Québec, ces professionnels font partie de l’Association des directeurs de casting du Québec. Créée en 1986, l’ADCQ soutient ses membres pour faire évoluer et rayonner le métier, et s’assure de faire respecter le code d’éthique de la profession. « Nous sommes une vingtaine de directeurs et directrices à adhérer à un code d’éthique qui reflète les valeurs de notre métier. Nous avons toutes nos façons uniques de travailler et nous croyons que l’union fait la force », précise Brigitte Viau.

Pour rester toujours alerte, le directeur de casting se promène beaucoup, voit des pièces de théâtre, des films, des séries télé, bref, tout ce qu’il peut pour repérer les talents que vous verrez à l’écran. « Je pourrais facilement visionner du matériel 24h/24 pendant des semaines et je n’arriverais quand même pas à tout voir ce qui se fait ici ! Anciennement, il y a avait 3-4 postes de télé et quelques films par année. Si tu voulais voir un artiste, tu devais soit aller vers lui au théâtre, soit l’inviter en audition. Maintenant, il y a une multitude de plateformes de visionnement, de chaînes de télé, des sites web des agents, de l’UDA, des démos d’artistes, des festivals de films, du théâtre, des ateliers Accès-casting et j’en passe. Ça fait en sorte que nous avons facilement accès à du visuel et pouvons ainsi découvrir de nouveaux talents. Bref, on a accès aux talents comme jamais », explique la directrice.

Ceux qui désirent faire ce métier débutent en aidant des directeurs de casting établis pour ensuite gravir les échelons du métier, car il n’y a pas de formation. Brigitte Viau, elle, a un baccalauréat en communication. « Aucun rapport avec le casting ! C’est un métier peu connu, qui est né aux États-Unis. Au Québec, le métier se transmet généralement d’une directrice de casting à une assistante qui devient à son tour directrice de casting et ainsi de suite. Une belle passation de savoir et de passion », témoigne celle qui est tombée dedans quand elle était petite, grâce à sa tante Louise Boisvert, une pionnière du casting au Québec dans les années 70.

Si vous désirez devenir directeur de casting, dites-vous qu’il faut tout d’abord être une personne qui a une bonne écoute, qui aime les gens et les artistes. La curiosité, la patience et la capacité d’adaptation sont aussi de belles qualités à avoir. « Les gens croient que c’est glamour faire du casting. En réalité, c’est un métier de l’ombre quand même solitaire. On passe de longs moments dans sa tête, à se parler, à regarder le plafond en s’interrogeant sur un personnage. Il faut aussi être capable de passer de très longues heures devant son ordinateur à fouiller les sites web des agents et de l’UDA et à gérer des tonnes de courriels. C’est accepter de passer du calme plat à une frénésie déconcertante, mais tellement stimulante quand on embarque sur un nouveau projet. Il faut aussi être capable de vivre en étant travailleur autonome avec ses hauts et ses bas », précise Brigitte Viau en terminant. |