Gilles de Maistre lors du tournage du film Le Loup et le lion (2021)
Entrevue avec le réalisateur Gilles de Maistre pour la sortie du film Le Loup et le lion
En février 2019, le réalisateur français Gilles de Maistre s’envolait pour le Québec afin d’y terminer le repérage de son prochain film, Le Loup et le lion. Deux ans plus tard, cette nouvelle fiction animalière, signée du réalisateur de Mia et le lion blanc, arrive dans nos salles. Si les deux œuvres mettent en scène le roi des animaux, cette nouveauté lui fait partager l’écran avec un loup, chose rare, voire unique au monde. Le Loup et le lion raconte comment deux bébés, Mozart et Rêveur, font la connaissance de la jeune Alma, dans sa demeure familiale située en forêt sur une île au Canada. Les deux bêtes grandiront ensemble sous l’œil attentionné de cette musicienne devenue par hasard leur mère adoptive. Pour nous raconter les dessous d’un tournage pas comme les autres, Gilles de Maistre s’est prêté à l’exercice de l’entrevue, et ce, tout juste avant de repartir à l’aventure pour sa prochaine production, un long métrage où les bêtes sauvages seront une fois de plus en vedette.
Gilles, votre nouveau long métrage est une coproduction entre le Québec et la France, mais il a été tourné en anglais. Est-ce pour mieux atteindre le public à l’échelle internationale?
Notre film est très familial et s’adresse principalement aux enfants, et ce, peu importe le pays qu’ils habitent. L’anglais permet effectivement une distribution plus large et le doublage, lui, au Québec comme en France, permet aux enfants de bien comprendre l’histoire sans l’aide de sous-titres.
« Le film a beau être une fiction, ce que vous voyez à l’écran, c’est du vrai, rien n’est truqué. »
Bien qu’habitué aux plateaux où les vedettes sont des animaux sauvages, pour Le Loup et le lion, vous avez reçu l’aide d’un spécialiste des loups, Andrew Simpson, qui a œuvré sur Game of Thrones et Le Revenant, notamment. C’est en assistant au tournage de Mia et le lion blanc qu’il a manifesté le désir de travailler avec vous, non?
Oui, il était venu sur notre plateau en Afrique du Sud et a rapidement manifesté le désir de travailler avec nous. Andrew possède une réserve avec des loups en Alberta, c’était donc l’homme idéal pour mettre en scène cette rencontre improbable entre deux êtres si différents. Parce que les stars du film, ce sont le lionceau et le louveteau. Avec l’expertise d’Andrew, nous avons réussi à montrer au grand écran l’amitié unissant ces deux animaux qui ont littéralement grandi ensemble, sous nos yeux, durant le tournage qui s’est étalé sur deux ans.
Concrètement, comment un loup et un lion peuvent évoluer ensemble?
Ça, c’est la magie produite par leur rencontre en bas âge. À partir du moment où ils sont élevés ensemble, peu importe leurs différences, ils deviennent frères. Les espèces apprennent l’une de l’autre, créant un effet miroir. Le loup imite le lion et vice versa. C’est marrant, car nous avons vu le lion creuser des terriers. C’est le loup qui lui a montré et c’est devenu naturel. Quand le loup hurlait, le lion arrivait. Et puis le loup s’est mis à taper sur les feuilles avec ses pattes, car il voyait le lion faire de même. Ils se sont copiés et sont devenus inséparables au fil des mois.
Si leur connivence est réelle au quotidien, sur un plateau de cinéma, même en pleine nature, les choses se déroulent-elles aussi bien que prévues?
C’est l’inverse d’un tournage classique. On ne fait pas de dressage, on fait de l’apprentissage par le jeu. Nous sommes à l’écoute des animaux en réécrivant le scénario en fonction de leur comportement et de leur humeur. C’était orchestré presque au jour le jour en observant la complicité qu’ils avaient avec Molly Kunz qui joue Alma. Pour une équipe technique, c’est un cauchemar de bonheur, car on attend toujours que survienne l’instant magique pour mieux le capter. Le film a beau être une fiction, ce que vous voyez à l’écran, c’est du vrai, rien n’est truqué. Mais si les animaux sont imprévisibles, notre gros problème, ça a été la COVID qui est venue interrompre le tournage durant plus de deux mois. Les animaux, eux, ne nous attendaient pas pour grandir.

Comment vous êtes-vous retrouvé au lac Sacacomie en Mauricie pour tourner presque l’entièreté du film?
On a visité plein d’endroits avec le désir de ne pas être trop loin de Montréal, question d’accessibilité. Des amis français qui habitent au Québec m’ont suggéré cet endroit magnifique qu’est le lac Sacacomie. Avec ma productrice canadienne, on a visité les lieux, dont l’hôtel. Quand le directeur est arrivé, il a sauté dans les bras de ma productrice, car ils avaient déjà collaboré ensemble sur une autre production voilà des années. J’ai pris ça comme un signe et tout s’est enclenché.
Depuis sa sortie en salle en France, l’automne dernier, votre film connaît beaucoup de succès.
Oui et c’est important autant pour moi que pour ma conjointe et scénariste Prune. On fait des films pour toute la famille, porteurs de messages forts comme la protection de la nature et de la faune. Ce qui me touche le plus, c’est que des parents amènent pour la première fois leurs enfants au cinéma pour voir nos films. Pour notre prochain projet, Jaguar my Love, un autre félin sera en vedette, mais son histoire nous permettra, sous la forme d’un conte, de sensibiliser les gens au trafic d’armes et d’animaux ainsi qu’à la déforestation en Amazonie. Une partie du long métrage sera d’ailleurs tournée en décembre (2021) à Montréal qui prendra pour l’occasion des allures de New York.
Un jaguar sur un plateau de tournage, ça a une bonne réputation?
(Rire). Je ne sais pas, je vous le dirai dans deux ans. |