|

Par

Entrevue avec Martin Bourboulon

Crédit photo : Unifrance

Entrevue avec le réalisateur Martin Bourboulon pour la sortie du film Eiffel (2022)

AprĂšs avoir obtenu un Ă©norme succĂšs avec ses deux comĂ©dies familiales mettant en vedette Marina FoĂŻs et Laurent Lafitte, Papa ou maman 1 et 2, le rĂ©alisateur Martin Bourboulon a changĂ© de registre en s’attaquant Ă  une fresque relatant la construction de la tour Eiffel. Eiffel est un rĂ©cit historique qui s’articule autour de son concepteur prĂ©nommĂ© Gustave (jouĂ© par Romain Duris) qui, alors que son nom circule partout Ă  la suite de la construction de la statue de la LibertĂ©, est appelĂ© par le gouvernement français Ă  concevoir une tour qui marquera la tenue de l’Exposition universelle de Paris, en 1889. Les dĂ©lais serrĂ©s de construction et les retrouvailles avec un amour de jeunesse seront au cƓur du dĂ©fi relevĂ© par ce gĂ©nie de l’époque.

Martin Bourboulon, ce projet de film autour de Gustave Eiffel ne date pas d’hier?

Effectivement, ça date de prĂšs de vingt ans. Moi, je suis arrivĂ© en 2017 au moment oĂč le scĂ©nario de Caroline Bongrand Ă©tait presque terminĂ©. Mais tout Ă©tait encore Ă  faire, le budget n’étant mĂȘme pas encore bouclĂ©. L’intĂ©rĂȘt de PathĂ© comme producteur Ă©tait lĂ , c’est tout. Cela dit, le scĂ©nario final est complĂštement diffĂ©rent de celui de 2017. Au final, il fallait que le budget suive, car un film d’époque, c’est Ă©norme. L’ambition ne pouvait demeurer Ă  moitiĂ©.

Le roman et le film misent sur la métamorphose des personnages et des saisons

Eiffel est Ă  la fois un drame historique, biographique et romantique. Avez-vous eu une rĂ©elle libertĂ© pour adapter Ă  votre maniĂšre une aventure ancrĂ©e dans le temps et dans l’histoire de la France au tournant du XXe siĂšcle?

Oui, heureusement on a pu jouer avec ça tout en Ă©tant trĂšs fidĂšle aux faits. On n’a rien inventĂ© concernant la rencontre entre Gustave et Adrienne BourgĂšs, son amour de jeunesse. Ils devaient vraiment se marier, et puis on a jouĂ© avec la fiction pour leurs retrouvailles qui correspondaient aux annĂ©es de la construction de la tour. On voulait montrer que cet amour passĂ© et inoubliable a vĂ©ritablement affectĂ© Eiffel.

Depuis son Ă©rection, la tour Eiffel est devenue l’un des principaux attraits touristiques Ă  l’échelle mondiale. Elle fut expressĂ©ment construite pour la tenue de l’Exposition universelle de 1889, Ă  Paris. Avec ses 330 mĂštres de hauteur, elle attire des millions de touristes chaque annĂ©e. Elle est constituĂ©e de 18 000 piĂšces fabriquĂ©es en fer puddlĂ© et rattachĂ©es par 2 500 000 rivets. Symbole parisien par excellence, elle dĂ©montre depuis prĂšs d’un siĂšcle et demi le savoir-faire du gĂ©nie industriel français. Sa crĂ©ation visait Ă  souligner le 100e anniversaire de la prise de la Bastille. Des milliers d’ouvriers et plus de 50 ingĂ©nieurs, sous la supervision de Gustave Eiffel, se sont attelĂ©s Ă  la construire sur une pĂ©riode de deux ans, soit le double du temps prĂ©vu au dĂ©part.

Romain Duris est un acteur talentueux et adulĂ©. Sa polyvalence au grand Ă©cran ne fait plus de doute et il endosse le costume de Gustav Eiffel avec aisance. Sa partenaire qui incarne Adrienne BourgĂšs, Emma Mackey, est cependant moins connue. Elle a Ă©tĂ© dĂ©couverte dans la sĂ©rie de Netflix, Sex Education. Comment s’est-elle imposĂ©e pour le rĂŽle?

C’est une idĂ©e de ma productrice Vanessa Van Zuylen. Au moment du casting, le visage d’Emma n’était pas encore trĂšs connu des Français et elle correspondait parfaitement au personnage. De plus, la chimie avec Romain Ă©tait au rendez-vous. À la sortie, il y a bien eu quelques critiques sur leur diffĂ©rence d’ñge et ça m’a Ă©tonnĂ©. Qui se questionne sur celle entre Daniel Craig et LĂ©a Seydoux dans James Bond? Personne ne s’en formalise. Romain et Emma correspondaient aux rĂŽles et Ă  l’écran, ils vieillissent sous nos yeux. Ces dix annĂ©es d’écart liĂ©es aux Ă©poques Ă©voquĂ©es dans le film, pour moi, ça tient la route.

D’un cĂŽtĂ© plus technique maintenant, les sĂ©quences reconstituant la construction de la tour sont totalement fascinantes. Ces scĂšnes dĂ©montrent tout le savoir-faire de l’époque en ingĂ©nierie.

Oui, ce sont des scĂšnes que j’aime beaucoup, car elles mettent en valeur le talent de ces ingĂ©nieurs et elles plaisent Ă©normĂ©ment au public en salle. C’était astucieux comme façon de faire en ingĂ©nierie et ça rend hommage au talent de ces hommes. On a fait un beau travail de recherche pour recrĂ©er Ă  l’écran cette expertise tout en respectant la chronologie de la construction dans son ensemble.

On imagine donc l’énorme travail de recherche historique en amont, mais toute la postproduction a aussi dĂ» prendre beaucoup de temps, non?
Ça a demandĂ© beaucoup de travail en montage, 36 semaines au total. Il fallait rendre crĂ©dible l’histoire de la tour tout comme l’histoire d’amour, au passĂ© et au prĂ©sent, et tisser des liens entre ces trois trajectoires. Et ça, c’est sans compter l’intĂ©gration des effets spĂ©ciaux pour recrĂ©er le Paris d’alors et faire voyager le spectateur durant deux heures. Le plus grand dĂ©fi, c’est qu’on croit que tout est vraisemblable. Pas rĂ©aliste, vraisemblable. Et d’y arriver, pour moi, c’est primordial, et ce, dans tous mes films. |


Cette entrevue a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e dans le cadre des Rendez-vous du cinĂ©ma 2022 d’UniFrance.

Martin Bourboulon rĂ©alise prĂ©sentement deux longs mĂ©trages inspirĂ©s par l’Ɠuvre d’Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires. Au gĂ©nĂ©rique de ces films on retrouvera François Civil (D’Artagnan), Romain Duris (Aramis), Vincent Cassel (Athos), Pio MarmaĂŻ (Porthos), Eva Green (Milady), Lyna Khoudri (Constance Bonacieux), Louis Garrel (Louis XIII), Vicky Krieps (Anne d’Autriche).